Anomalies
NICOLAS JULLIARD

Pour les journalistes littéraires, l’approche de l’été s’apparente à un exercice délicat de bilans et perspectives. A-t-on lu les romans essentiels des derniers mois? A quels titres du printemps donne-t-on une dernière chance avant de se projeter avec avidité sur la voie, pavée de livres en service de presse, de la rentrée littéraire?

Les lectrices et lecteurs, fort heureusement, s'embarrassent moins des dates de péremption de l’actualité éditoriale. Prix Goncourt 2020, L’Anomalie de Hervé Le Tellier, paru en édition de poche au début du mois, caracole à nouveau au sommet des ventes de livres, en Suisse romande comme en France. Le roman, il est vrai, joue à merveille des aberrations de l’espace-temps, et la réplique de son premier succès apparaît comme un joli clin d'œil au dédoublement des personnages mis en jeu dans ce récit. 

En attendant de découvrir, peut-être, le prochain prix Goncourt, l’équipe de QWERTZ vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour un dernier numéro spécial été, truffé de propositions de lectures à faire avant la déferlante de la rentrée. D’ici là, belles lectures et belles écoutes! 
JE M'INSCRIS !

LYRIQUE
Sax, calme et volupté

 
Le Martiniquais Patrick Chamoiseau, Prix Goncourt 1992, signe une forme d’opéra jazz où le conte, l’improvisation et la mémoire de l’esclavage conspirent à forger un discours éminemment contemporain, hommage insulaire à la poésie de Baudelaire. Une création devenue livre et accompagnée d’un enregistrement live du saxophoniste Raphaël Imbert.

Par Ivor Malherbe


     

TRAGIQUE
La mort aux trousses
 

Avec le feu, le vide et la mort en ligne de mire, le romancier, essayiste et traducteur Claro signe ici une méditation poétique sur la disparition, rythmée par une ponctuation inventive, hantée par les mots des autres et portée par un lyrisme baroque d’une beauté stupéfiante.

Par Francesco Biamonte


     

CRYPTIQUE
Peur sous la ville
 

Des cadavres sont exhumés de la cathédrale Saint-Pierre à Genève. Menant l’enquête, le commissaire Fournier arpente la vieille-ville à la recherche d’un mystérieux passe-muraille. Ancien homme de radio, Francis Parel invite à explorer les souterrains de la Cité de Calvin.

Par Pierre Philippe Cadert


         

DYNAMIQUE
La Suisse en cases

 

A l'occasion du festival Delémont'BD qui s'est tenu le week-end dernier avec comme invitée d'honneur la bédéiste française Florence Cestac, portrait de la scène suisse de bande dessinée riche et variée: de Rodolphe Töpffer à la nouvelle génération, en passant par l’explosion de la scène genevoise dans les années 1990.

Par Gilles de Diesbach/aq

 
Vincent Held, directeur du festival Poésie en arrosoir, dont la 20e édition se tient du 1er au 10 juillet à Cernier.

ARROSOIR 10 LITRES VERT


Poésie en arrosoir connaît sa 20e édition cet été. Quel bilan tirez-vous de cette longue et belle aventure?

À titre personnel, la poésie m’a ouvert à une richesse insoupçonnée. Quand j’ai lancé ce festival, j’avoue que je n’étais pas un spécialiste de la discipline. J’avais une formation d’ingénieur et au niveau théâtral, je venais du monde de l’improvisation théâtrale. Depuis 2003, j’ai découvert le foisonnement de la poésie, mais aussi toutes les formes possibles qu’il y a de l’interpréter. Le pari initial tenait de l’utopie. Si on veut avoir du succès, on ne se lance a priori pas dans un festival de poésie, un genre littéraire qui n’est pas forcément très populaire. Toutefois, à force d’offrir des spectacles de grande qualité portés par des artistes talentueux, le festival a permis à de nombreuses personnes de découvrir la richesse de la poésie. Un·e spectateurice qui vient une fois au festival devient un·e fidèle de l'événement.

Le dialogue entre les mots et la musique joue un rôle essentiel dans le programme de cette édition. Une constante?

Il est vrai que la plupart des propositions artistiques qui me sont faites et qui, par conséquent, sont programmées, enjoint à ce dialogue. Je dirais que c’est une constante dans le monde francophone où, depuis longtemps, la poésie est portée par les chanteurs et chanteuses. Contrairement au monde arabe, nous avons moins cette tradition de la transmission « non-chantée » de la poésie. C’est néanmoins un exercice complexe quand la musique accompagne un texte parlé. Il faut être attentif à ce que la force évocatrice de la musique ne vienne pas éteindre la force des mots. La synergie est très subtile à trouver.

Après deux décennies d’activité, avez-vous le sentiment d’avoir favorisé l’émergence d’une scène poétique et musicale dans la région?

Je pense que depuis 20 ans, la poésie a pris une nouvelle place sur les scènes romandes. À l’époque, il me semble que peu de comédien·nes amenaient la poésie sur scène. Aujourd’hui, il y a énormément de propositions. Dans le programme de cette année, 10 spectacles sur 15 proviennent de la scène romande. Ces dernières années, on a également vu naître d’autres festivals consacrés à la poésie (Printemps de la Poésie, Cellules poétiques, Salves poétiques, soirées slam, etc.)


Propos recueillis par Nicolas Julliard
ROMAN
Deesha Philyaw, La vie secrète des bigotes, ed. Philippe Rey, 128 p.
Elles portent des noms bibliques et leur éducation religieuse leur colle à la peau, à l’âme, à la conscience. Mais les bigotes de Deesha Philyaw ne sont pas des grenouilles de bénitier. Sœurs, mères, amantes ou gamines rebelles, ces femmes, afro-américaines des années 1990 à nos jours, sont partagées et parfois déchirées entre leur héritage culturel, leur place assignée dans le monde et leur désir d’affranchissement. Neuf nouvelles parfaitement menées, drôles et féroces, qui brassent les générations, les classes sociales et les blessures enfouies. SK

 
RECIT
Avraham B. Yehoshua, La fille unique, ed. Grasset, 208 p.
L’auteur israélien, décédé le 14 juin dernier, affectionnait les petits décalages qui permettent d’échapper aux idées qui enferment. Fervant militant pour la paix et la création d’un Etat binational, Yehoshua a choisi la forme du conte pour un pas de côté qui permet d’imaginer la fluidité entre les identités et les religions. Son héroïne, fillette juive et italienne, intelligente et curieuse de toutes les opinions, incarne la liberté et l’avenir face à un père soucieux à l’excès de préserver sa culture. Un père qui souffre d’un cancer au cerveau, la métaphore est criante. AS

 
ROMAN GRAPHIQUE
Meryl Schmalz, Tu ne finiras jamais dans une assiette, ma chère, ed. La Joie de Lire, 128 p.
Entre des paysages champêtres et les rues animées de Bologne, l'illustratrice nous emmène sur les traces du souvenir qu'elle chérit de Nourrin, la truie gagnée à une foire de village quand elle était jeune adolescente. Quand sa famille lui annonce qu'ils devront quitter leur maison pour s'installer ailleurs, qu'adviendra-t-il de Nourrin? Et d'elle? Réfléxion cinématographique sur notre rapport aux bêtes et au monde, ce roman graphique est une ode mélancolique à l'enfance, chanson douce d'un temps révolu qui a marqué l'autrice à tout jamais. SG

 
ROMAN
Vincent Kappeler, Les six vies de Salomon, ed. Hélice Hélas, 120 p.
A travers les vies pathétiques de Salomon, personnage récurrent enjambant les époques avec ses congénères et ses porcs, Vincent Kappeler décrit à sa manière grotesque le destin d’une humanité vouée, de la plus haute Antiquité au seuil du 4e millénaire, à ressasser sa médiocrité de toupie mortifère. Démembrements expéditifs, vestiges d’industrie et missions absurdes, le monde post-apocalyptique dépeint par l’auteur romand s’inscrit dans l’héritage macabre d’un Buñuel, d’un Topor, humour inclus. NJ
  • Simon Johannin est auteur et poète, Jardin est musicien·ne et Brûler dans la ville est une performance qui fait dialoguer leurs écritures sur de la techno. Entre lyrisme postromantique, trap politique et vidéo pamphlétaire, la performance du duo "tabasse les cœurs, s’amourache des ruines et ose évoquer un futur sensible et rêvé". 
    Fribourg, Festival Belluard, sa 25 juin à 22h

     
  • Dans son nouveau numéro, 69, le collectif de BD SPLOTCH nous parle de sexe, ni plus ni moins. Les auteurices ont tout osé, en allant chercher l’inspiration dans tous les aspects du sujet - poétique, humoristique, caustique, touchant, philosophique. Le vernissage de l'exposition a lieu ce soir, en présence des artistes. Entrée libre. 
    Lausanne, Libraire Humus, ve 1er juillet dès 19h

BENEFIQUE
Livres de femmes pour hommes?


La fiction écrite par des femmes est peu lue par les hommes, déplore le Women's Prize for Fiction. L'organisation britannique a sollicité ses membres pour établir la liste de dix livres essentiels écrits par des femmes que les hommes devraient lire au moins une fois dans leur vie. 

Par nj/mh

          
 
  • Chaperonnée par lʹauteur de polars Marc Voltenauer, une classe de 8p du collège de Blonay-Saint-Légier sʹest lancé un défi fou: écrire un roman policier pour la jeunesse à 21 mains. Présenté à la rentrée de septembre prochain, Le secret de la balance rouge (ed. Auzou) conte une histoire de vengeance ayant pour théâtre la région dʹorigine de ses autrices et auteurs en herbe. Lʹenseignant Esteban Feo et deux de ses élèves, Celia Lagler et Lenny Epars, étaient les invités de Quartier Livre.
     
  • Nicolas Donin, musicologue et professeur à l’Université de Genève, a choisi de cheminer dans l’univers de Georges Aperghis à partir d’une soixantaine d’images, de bout de films, de pièces de théâtre, qui ravivent le souvenir du compositeur dans Conversation imagée. Anne Gillot nous en parle dans Musique matin
  • Le livre de poche, une histoire de plage? Aujourd’hui, plus d’un livre sur trois vendu en France serait un livre de poche, et la saison estivale se prête particulièrement bien aux opérations commerciales et éditoriales liées au petit format. Caroline Coutau, directrice des éditions Zoé et Yasmina Giaquinto, libraire à Martigny, sont les invitées de Nicolas Julliard dans Quartier Livre
    RTS-La Première, Quartier Livre, dimanche 26 juin à 16h 
LES ARCHIVES AUDIO DE QWERTZ
Ont collaboré à ce numéro
Francesco Biamonte, Pierre Philippe Cadert, Catherine Fattebert, Sophie Grecuccio, Nicolas Julliard, Salomé Kiner, Ivor Malherbe, Anik Schuin.


Crédits photographiques
Patrick Chamoiseau et Raphaël Imbert: © Patchwork Studio
Claro: © J Panconi
Francis Parel: © RTS

Vincent Held: © Guillaume Perret
 
Nous écrire
Facebook
Instagram
Twitter
Site web
Copyright © 2022 Radio Télévision Suisse, Tous droits réservés.

Notre adresse est:
Radio Télévision Suisse
20, Quai Ernest-Ansermet
Case postale 234
Genève 1211
Switzerland

Add us to your address book


Voulez-vous changer la manière dont vous recevez ces messages?
Vous pouvez
mettre à jour vos préférences ou vous désinscrire de cette liste.

Email Marketing Powered by Mailchimp


Charte de confidentialité