« Ce putain de copier-coller de dépêches AFP permanent » | | Cette annonce a pu mettre du baume au cœur à une profession en souffrance. Effet de la crise sanitaire, les Français sont plus nombreux qu'avant à considérer le journalisme indispensable en démocratie, d'après un sondage réalisé par les Assises du journalisme, qui se sont tenues du 29 septembre au 1er octobre à Tours. 81% des sondés estiment qu'on ne peut pas s'en passer « dans une société démocratique ». Malgré cette preuve d'amour, les journalistes rendent leurs tabliers en masse, victimes d'un blues bien tenace. Comme le rapportent le sociologue Jean-Marie Charon et la chercheuse à l'université Le Havre-Normandie, Adénora Pigeolat, dans leur essai tout juste paru, Hier, journalistes, ils ont quitté la profession, le nombre de cartes de presse délivrées a reculé de 10% ces dix dernières années – un rythme de recul qui double même en 2020. En 2009, le nombre de journalistes professionnels s'élevait à 37 392 contre 34 562 titulaires en 2020, selon les chiffres de la Commission de la carte d'identité des journalistes professionnels (CCIJP). Après avoir interrogé 55 journalistes en cours de reconversion, le constat est amer : hausse de la précarité, dégradation des conditions de travail, désenchantement, perte de sens, nature délétère des relations entre collègues ou avec la hiérarchie, transformation des médias qui « rendrait insupportables » les conditions d'exercice du métier, corps et santé qui flanchent... La sonnette d'alarme est tirée dans une profession « complètement dérégulée », en proie à une précarisation croissante. Une déception profonde À écouter les aventures de la reporter Florence Aubenas, lors de Télérama Dialogue 2021, ce lundi 27 septembre, on se prend à rêver : la presse est un métier de terrain, excitant, où la place est accordée au temps long, à la profondeur, à l'enquête : « J'aime le côté très concret de la presse, aller sur le terrain. C'est l'essence de mon métier. Je n'en suis jamais fatiguée ni rassasiée. Aller à Caen, devenir femme de ménage... Ce côté aventure me plaît », témoigne la journaliste du Monde et autrice de L'Inconnu de la poste et Le quai de Ouistreham, face à un public attentif. Mais pour la majorité des « plumes », la réalité est nettement moins reluisante. Après un Bac +5, les tâches vides de sens s'enchaînent, selon les témoignages recueillis par les deux auteurs de l'enquête collaborative. C'est l'avènement du journalisme low cost : « Cloué à un bureau 11 heures par jour pour réécrire des communiqués », « des interviews à la chaîne, des papiers sans beaucoup d'autres sources que l'AFP », « ce putain de copier-coller de dépêches AFP permanent », « en télévision, cela peut se résumer à des conférences de presse ». Les journalistes sont devenus, ni plus ni moins, des « ouvriers de l'info dans leur usine feutrée ». Des conditions économiques difficiles « Cette activité des journalistes se serait sensiblement appauvrie au point de perdre largement sa substance », contextualisent Jean-Marie Charon et Adénora Pigeolat. Le métier s'assimilerait à de la simple production de contenu. Une activité stérile qui se double d'un modèle économique humiliant : « Je devais courir après le versement des salaires », raconte une pigiste. Et dans tout parcours de journaliste moderne, il est inévitable de prendre un poste mal payé, au-dessous de ses compétences. Alors trop, c'est trop ? Un appel pour faire bouger les lignes Face à cette cruelle désillusion, certains journalistes ne voient qu'une issue pour retrouver du sens : mettre les voiles... et s'orienter vers des terres plus clémentes telles que la communication, l'enseignement, le marketing. Un départ de plus en plus précoce : une petite moitié a 35 ans ou moins, avec à peine une dizaine d'années d'exercice du métier ! « S'ils quittent le journalisme, c'est par soif de faire. La posture de l'observateur, du témoin, de l'analyste, du commentaire ne leur suffisait plus. Ils ont voulu être acteurs », explique l'essai, avec une note d'espoir. | | | JUNGLE STORIES | « On est tous préoccupés par le fait de comment mieux s'en sortir au travail » Sous un angle de développement personnel très appuyé, Welcome to the Jungle entend apporter des armes concrètes pour se défendre face à la jungle du travail, milieu obscur et fluctuant. Preuve de sa force de frappe (et du nombre de démunis), Welcome to the Jungle est suivi sur LinkedIn par plus de 515 000 personnes, talonnant Les Echos et Le Monde. À côté de cette activité, Welcome to the Jungle mise sur le business avec sa plateforme de recrutement : toute entreprise y est libre de se présenter à travers des « contenus exclusifs » pour montrer aux candidats potentiels l'envers du décor. Story Jungle s'est entretenu avec Jérémy Clédat, cofondateur de Welcome to the Jungle. On y a parlé désillusion, succès, et futur après une année rude. | | | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | Pour les créateurs de contenus sur Clubhouse, la déception est grande. Depuis des mois, des dizaines de membres du programme « Creator First » attendaient leur première réunion de parrainage. Clubhouse devait leur venir en aide pour décrocher des sponsorships et faire de leurs émissions une activité rentable. Contrairement aux attentes, il s'est révélé qu'il n'y aurait finalement « pas de rendez-vous individuels avec les marques », a relaté The Verge qui a recueilli les témoignages de certains créateurs. « C'était une grosse blague » a fustigé Cyndi Pham, consultante média. Pourquoi c'est un pavé ? Un vent de colère souffle sur les créateurs Clubhouse. Aucun des six créateurs du programme interrogés ne compte continuer à produire ses émissions, et préfère se focaliser sur d'autres plateformes, plus rémunératrices. « Si Clubhouse ne parvient pas à inciter les marques à investir dans son contenu premium sélectionné à la main, comment pourra-t-elle retenir les créateurs sur la plateforme ? », s'interroge le média américain. Aucune possibilité de monétiser régulièrement les émissions, système de pourboire inefficace, pas d'insertion automatique de publicité : pour 96% des sondés de notre sondage LinkedIn, Clubhouse irait droit dans le mur ! | UN FORMAT À LA LOUPE | | 52% des utilisateurs TikTok trouvent les publicités « amusantes et attrayantes » et 32% déclarent avoir fait des recherches sur un produit ou un projet, après avoir regardé une vidéo de marque. Selon une étude publiée par la plateforme Disqo et relayée par Digiday, les publicités sur TikTok ne sont pas seulement plus accrocheuses que la moyenne de celles des plateformes sociales, mais elles ont également une plus grande propension à générer une action. Plusieurs types d'opportunités publicitaires y sont présentes : des in-feed ads, des placements d'influenceurs... « Cette variété ainsi que leur intégration dans le contenu d'une manière qui est moins interruptive que les publicités traditionnelles semblent contribuer à leur attrait pour les utilisateurs », explique Anne Hunter, vice-présidente du marketing produit de Disqo. L'étude, menée auprès de 17 000 utilisateurs de TikTok en Amérique du Nord entre les 20 et 21 septembre, montre aussi que les utilisateurs aux revenus confortables de l'appli scrollent longtemps sur l'appli. Par ailleurs, 50% des répondants âgés de 35 à 54 ans l'utilisent quotidiennement. « Ils deviennent des utilisateurs puissants, tout comme les cohortes plus jeunes », a conclu Anne Hunter. En parlant de plateformes, retrouvez notre interview de Cyril di Palma, délégué de Génération Numérique, qui travaille sur des campagnes de sensibilisation contre le harcèlement et la désinformation en ligne avec Instagram, TikTok et bientôt Snapchat ! | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | On vous conseille ce papier de Vice sur des marques qui « supplient une femme de les ridiculiser sur TikTok » : Emily Zugay, dont la marque de fabrique est de « troller les gens en prétendant être stupide », redessine gratuitement les logos – qu'elle trouve absurde – de certaines entreprises, telles que Starbucks ou Amazon... Elle prétend ainsi détester le logo d'Apple, la pomme croquée qu'elle trouve complètement « asymétrique », « où le nom de la marque n'est même pas mentionné ». La nouvelle version, totalement cheap, se présente dans un carré vert où est écrit simplement Apple. Face au succès des vidéos, de nombreuses marques tentent désespérément de bénéficier de « ses services »... | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | Alors que la chanteuse Britney Spears vient d'être libérée de la tutelle de son père, Netflix propose Britney vs Spears, un documentaire édifiant sur les 13 ans de son calvaire. L'enquête, bien documentée, produite par la réalisatrice Ellen Lee Car et la rédactrice en chef du magazine Rolling Stone, Jenny Eliscu, décrypte comment Jamie Spears, le père de la star, a contrôlé la vie privée de la chanteuse d'une main de fer, en s'appuyant sur un réseau d'avocats et de managers. Effrayant. Une question ? Une remarque ? N'hésitez pas à nous envoyer un mail : alexandra.klinnik@storyjungle.io |
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