Impossible cette semaine d’échapper à la déferlante DeepSeek. La start-up chinoise s’est imposée à la vitesse de la lumière comme le nouveau champion de l’intelligence artificielle (IA), capable de faire trembler les Américains jusqu’ici considérés comme intouchables. Certes, nous n’avons peut-être pas vécu un «moment Spoutnik» (comme lorsque le satellite lancé par les Soviétiques en 1957 avait bouleversé l’ordre établi), comme l’a affirmé notre chroniqueur et spécialiste Xavier Comtesse, interrogé par ma collègue Sophie Marenne. Cependant, le doute s’est installé aux Etats-Unis. Ces derniers pensaient avoir contenu la concurrence chinoise dans ce domaine, grâce notamment à l’interdiction de lui livrer les précieuses puces nécessaires au bon fonctionnement de l’IA. De cette crise, la Chine a fait une opportunité (d’ailleurs ces deux mots n’en font qu’un en mandarin). Les Américains ont sans doute commis une erreur de jugement majeure. Cet épisode me fait penser à la manière de penser des entrepreneurs en Chine. Pendant les quelques années que j’y ai passées, j’ai visité plusieurs usines, notamment horlogères. Ce fut l’occasion de découvrir comment les ingénieurs y innovaient par une série de petites touches permettant d’améliorer le processus de production. Sans grande théorie mais avec beaucoup d’ingéniosité. Cette approche déroutait les esprits très cartésiens envoyés par les maisons-mères européennes surveiller la qualité produit, au final aussi bonne et à un coût moindre. N’est-ce pas ce que promet DeepSeek? S’il y a un moment Spoutnik récent à pointer, il se trouve peut-être dans la gestion d’actifs européenne. Il y a dix jours, le français Natixis et l’italien Generali ont annoncé leur rapprochement afin de former un champion pesant 1900 milliards d’euros d’actifs. Cette fusion transfrontalière, une opération rare, est la réponse à la pression exercée sur ce marché par les géants américains. BlackRock, Vanguard, Fidelity et autres State Street profitent des économies d’échelle permises par leur marché domestique pour venir convaincre les caisses de pension de leur confier la gestion de leurs avoirs. Et en Suisse? Les acteurs locaux restent en position de force, a constaté mon collègue Christian Affolter. UBS détient 36% des capitaux gérés, Swisscanto 11% et Pictet 6%. Mais BlackRock occupe désormais la troisième place, avec 9% du total. Il revient aussi au Conseil fédéral de créer les conditions cadre afin de maintenir un marché dynamique et diversifié. La question se pose d’ailleurs aussi au sujet du marché de la gestion de fortune dite «cross-border» et dont la Suisse est pour l’instant la référence mondiale. La semaine a aussi été marquée par les vives critiques de Donald Trump contre la Réserve fédérale (Fed). Mercredi soir, la banque centrale américaine a décidé de laisser ses taux d’intérêt directeurs inchangés, alors que le président américain «exigeait» une baisse. Les Etats-Unis sont en plein boom économique et l’inflation reste élevée. Il n’y a donc aucune raison d’assouplir la politique monétaire. Une politique qui, par ailleurs, n’a rien à voir avec «l’idéologie de genre», contrairement à ce qu’affirme de manière surréaliste le nouveau locataire de la Maison-Blanche… La vraie question est de savoir si Jerome Powell cèdera à la pression et remettra en cause l’indépendance de la Fed. Nommé par Donald Trump en 2018 et reconduit depuis par Joe Biden, il a exclu toute démission et affirmé son intention de rester en fonction jusqu’à la fin de son mandat de président, en mai de l’an prochain. L’ancien avocat pourrait même siéger au Conseil des gouverneurs jusqu’en janvier 2028, date de fin de son contrat. Ce serait toutefois contraire à la pratique. Enfin, pour vous détendre, et si vous alliez faire un tour à ArtGenève? Le salon de l’art moderne et sa centaine d’exposants pourraient être l’occasion de faire de bonnes affaires. L’an dernier, le marché a subi une sévère correction, comme l’a raconté ma collègue Sophie Marenne dans un dossier richement documenté. |