Natasha Brown, Assemblage, ed. Grasset, 160 p. 

Ne jamais se faire remarquer, sourire. Être douce, convenable. S'écraser pour se faire accepter. Jeune femme anglaise d'origine jamaïcaine, la narratrice occupe un poste important dans la City, vient d'acheter un appartement et sort avec un blanc fortuné, qui l'invite dans la maison de ses parents pour fêter leur anniversaire de mariage. Au milieu de l'hypocrisie et la condescendance de la société qui l'entoure, elle se demande si ce n'est pas trop tard pour tout foutre en l'air et respirer. Dans ce court récit, la nouvelle coqueluche des lettres britanniques n'assemble pas, détruit, dissèque et déconstruit l'image d'elle-même et de cette bourgeoisie qui se veut anti-raciste, inclusive et progressiste. Dense et tranchant. SG

Caroline Dorka-Fenech, Tempêtes et brouillards, ed. La Martinière, 240 p. 

Pour Carina, la nouvelle frappe comme un coup de poing: son père lui annonce qu’il part vivre sa retraite en Algérie. Peu de temps après il lui signale qu’il se remarie avec une femme aussi jeune qu’elle, qu’il se convertit à l’islam et la déshérite, elle et ses frères. Vives comme le feu, les blessures béantes que la relation avec cet homme lui ont laissées depuis l’enfance remontent à la surface. Débute alors une quête de salut qui passe par l’écriture et la réappropriation de son histoire, sous l’ombre du Roi Lear de Shakespeare. Pas une minute de répit dans la lecture de ce roman à l’histoire et à l’écriture acérées comme une lame de rasoir, qu’on ne lâche plus du début à la fin. COC

Mathieu Palain, Nos pères, nos frères, nos amis, ed. Les Arènes, 234 p. 
Pas besoin d’être un fou furieux pour lever la main sur sa conjointe. Les hommes violents peuvent être Nos pères, nos frères, nos amis. Pendant plusieurs mois, le journaliste Mathieu Palain a assisté à des groupes de parole thérapeutiques, interviewé des psychologues, les auteurs de ces violences et leurs victimes. Le récit de son immersion est éprouvant mais nécessaire. Il déconstruit les mécanismes du passage à l’acte, détricote les liens pathogènes et nous pousse à questionner nos propres comportements, parfois calqués sur des stéréotypes de genre aliénants. SK
 

Hélène Frappat, Trois femmes disparaissent, ed. Actes Sud, 192 p. 
Tippi Hedren fut harcelée par Hitchcock. Sa fille Melanie Griffith ne tourna pratiquement que nue. Et la fille de cette dernière, Dakota Johnson, incarna à l’écran la Soumise de 50 nuances de Grey. Endossant le rôle d’une détective de cinéma, Hélène Frappat mène l’enquête sur ces corps de femmes livrés à de dangereuses obsessions, entre exhibitionnisme et invisibilisation. Dans une écriture elliptique, l’autrice dévoile une lignée, une malédiction familiale alimentée par les motifs récurrents de la domination masculine. NJ