Le bal des mots dits
ELLEN ICHTERS

Pauline s’appelle en réalité Polina. C’est pareil, pourrait-on dire. Sauf que, pour Polina Panassenko, c’est l’objet d’une véritable aventure, à la reconquête de son prénom d’origine. Dans Tenir Sa Langue, son premier roman, les mots de Pauline la Française doivent apprendre à faire ménage commun, mais chambre séparée avec ceux de Polina la Russe, quitte à repenser de nouveaux espaces. Trouver sa langue, c’est (re)trouver sa place.

Ou pas. David Lopez préfère en dire le moins possible pour laisser le champ libre à l’imaginaire rêveur de son deuxième roman, Vivance. Son narrateur, jamais nommé, traverse des paysages anonymes, ni ville, ni campagne. Des lieux sans mots pour les décrire, parce que les nommer signifierait les figer, leur enlever leur instantanéité, leur poésie.

Des rythmes, des respirations. Des répétitions. Des mots qui valsent et parfois des mots qui sonnent comme des coups de canon. C’était l’effet souhaité par Winston Churchill lorsqu’il pensait ses discours, dont celui, le plus célèbre, prononcé le 13 mai 1940, tissé de larmes, de sueur et de sang. Dans Un Noël avec Winston, Corinne Desarzens brosse le titan Churchill en moins de 200 pages, d’une fulgurance qui rappelle l’énergie folle de son sujet. Ces mots à lire, ces mots à entendre, et que nous avons cueillis avant qu’ils ne s’échappent, nous vous les offrons dans leur plus simple appareil. 


Bonnes lectures et bonnes écoutes!
JE M'INSCRIS !

INDOCILE
Que la fête commence
 

Comment raconter Churchill, sujet d'innombrables biographies? En passant par Winston, nous réplique Corinne Desarzens, dans une évocation virtuose de l'homme, de ses manies et inclinations.
 
Par Ellen Ichters


     

AGILE
Prendre langue

 
Dans un premier roman très subtil et touchant, Polina Panassenko explore ce sentiment d'entre-deux vécu entre sa langue maternelle, ses racines russes et son enfance française hantée par un impératif d'assimilation.

Par Layla Shlonsky


     

MOBILE
A bicyclette


Amoureux du rap et du parler populaire, David Lopez livre dans son deuxième roman le récit d’un homme qui parcourt la France périphérique à vélo et partage sa découverte de personnages insolites au gré de ses rencontres.

Par Sylvie Tanette

         

VILE
Le mystère du Dahlia noir en BD

 

A Short Story, la véritable histoire du Dahlia Noir retrace la vie d'Elizabeth Short, actrice au destin tragique dont le meutre jamais élucidé a inspiré James Ellroy, Brian de Palma ou David Fincher. Les deux auteurs, Run et Florent Maudoux, se sont basés sur des documents et témoignages historiques pour lui rendre hommage. 


Par Didier Charlet/ms

    
Matteo Campagnoli, directeur artistique du Festival Babel à Bellinzone (15-18 sept.)
 


Le festival Babel s’intéresse cette année à la rencontre des arts et à “l’ekphrasis”, de quoi s’agit-il?

Babel est un festival de littérature qui a toujours placé la traduction au centre de ses recherches, dans toutes ses déclinaisons. Non seulement la traduction littéraire d'une langue à l'autre, mais aussi la traduction d'un langage artistique à l'autre, et, en élargissant encore la perspective, la traduction comme métaphore de l'approche et de la rencontre, de l'hospitalité: s'ouvrir à l'autre à partir de soi pour l'accueillir chez soi. Le résultat est l'hybridation. Dans l'édition de Babel de cette année, nous essayons de réfléchir précisément à cette question: que se passe-t-il lorsque deux expressions artistiques entrent en contact? Comment se contaminent-elles les unes les autres? Comment se transforment-elles? L'ekphrasis, dans son sens le plus courant, est la description poétique d'une œuvre d'art. Citons par exemple l'Ode à l'urne grecque de John Keats ou, si l'on remonte aux origines de la littérature européenne, les trente vers par lesquels Homère décrit le bouclier d'Achille dans l'Iliade. D'une part une œuvre d'art sculpturale ou picturale, d'autre part des mots qui tentent de se hisser à la hauteur de l'objet qu'ils décrivent. Un art qui génère d'autres arts. En dernière analyse, il s'agit là aussi d'une forme de traduction.

Votre festival accorde une place importante à des autrices et auteurs français, à quoi tient cette situation?

Pour être honnête, je dois admettre que ce n'était pas un choix conscient. Nous recherchions des auteur·ice·s dont l'écriture est fortement nourrie par d'autres arts, et des artistes qui opèrent entre plusieurs arts. La première personne à laquelle j'ai pensé est Frédéric Pajak, qui, dans les neuf volumes de son Manifeste incertain, réalise une synthèse totalement unique et novatrice entre l'écriture et l'illustration. Jean Echenoz est un superbe écrivain, il est l'exemple parfait du pur conteur d'histoires qui, en même temps, est fasciné par d'autres arts comme le cinéma et la musique au point d'importer leurs techniques dans ses romans. Puis j'ai découvert le projet Ma nuit au musée des Éditions Stock à Paris, en soi absolument irrésistible par rapport au thème du festival - un écrivain passant une nuit solitaire dans un musée. Puis Fabienne Radi, Jérémie Gindre, Donatella Bernardi de la Maison Rousseau et Littérature de Genève ou encore Gwenn Rigal. Au final, sans le vouloir, je me suis retrouvé avec un festival presque entièrement francophone!

Babel se passionne pour la traduction. Comment se porte la traduction en italien en ce moment? 

Le climat est froid. Surtout avec les récentes augmentations des factures d'électricité et de gaz. Si les traducteur·ice·s en Italie devaient faire le compte - et je parle des excellents traducteurs, ceux qui traduisent de grands auteurs - s'ils devaient faire le compte du temps qu'ils passent sur une page par rapport à leur rémunération, ils changeraient tous de métier. En fait, ils font le calcul, mais ils continuent quand même, avec passion et dévouement. En Suisse, heureusement, les choses vont mieux mais, numériquement, c'est un pourcentage plutôt faible par rapport à ce qui est traduit en italien. D'autre part, je constate que les cours de traduction littéraire se multiplient, ce qui suggère que de plus en plus de personnes sont attirées par ce travail, et c'est certainement une bonne nouvelle.

Propos recuillis par Nicolas Julliard
ROMAN
Christophe Ono-dit-Biot, Trouver refuge, Ed. Gallimard, 416 p.
En 2027, le peuple français a élu un autocrate brutal soutenu par le parti nationaliste. Directement menacés par le pouvoir en place, Sacha et sa petite fille de 7 ans fuient Paris pour se réfugier au mont Athos. Sur ce territoire autonome régi par les règles byzantines, le duo passe d’un monastère à l’autre, traqué mais illuminé par la beauté des lieux. Avec cette dystopie aux allures de thriller politique et métaphysique, l'auteur confirme ses thèmes de prédilection: la transmission, l’émerveillement.

JMF
 
ROMAN
Reynald Freudiger, Vanité, ed. de l’Aire, 152 p.
Sur le principe de la célèbre Ronde d’Arthur Schnitzler, chaque chapitre de Vanité parcourt, à l’aide de personnages pivots, une chaîne de destins unis par l’exil, la langue portugaise et l’appréhension d’un avenir incertain. Rien de passéiste cependant dans la saudade élégante de ce roman, abordant à travers un drame ordinaire les débats qui agitent la société contemporaine, de l’antispécisme aux théories du complot. NJ

 
ROMAN
Laurence Potte-Bonneville, Jean-Luc et Jean-Claude, ed. Verdier, 160 p.
L’un est sous curatelle, l’autre sous tutelle. Une fois par semaine Jean-Luc et Jean-Claude ont le droit de sortir boire un verre. Sans alcool. L'histoire se déroule en quelques heures à peine: un billet de loto non autorisé, une rencontre avec un blond bien louche et soudain tout dérape. Les deux compères prennent la route de la liberté en échappant au cadre fixé, dans cette France du nord, en bord de mer, où une tempête inouïe a été annoncée. Une aventure humaine délicieusement racontée dans ce premier roman de Laurence Potte-Bonneville qui vient de recevoir le Prix Stanislas. SG
 
ROMAN
Oscar Lalo, Le salon, ed. Plon, 160 p.
Un vieux garçon de 39 ans découvre Flaubert dans le bac d’un bouquiniste. Bientôt, par un concours de circonstances maladroites, cet homme sans histoire initie à la littérature le personnel d’un salon de coiffure chic. Avec tendresse et humour, Oscar Lalo explore la manière dont la fièvre de la lecture peut se transmettre, célébrant le pouvoir de transformation profonde que recèlent les grands classiques, pour soi-même et pour ses proches. NJ

HABILE
Quartier Livre sur les quais bis


Dans Mais qui a tué Marc Voltenauer?, Xavier Michel nʹhésite pas à assassiner le roi du polar romand, retrouvé mort dans le port de Morges, au Livre sur les Quais. Lʹoccasion était un peu trop tentante pour que Quartier Livre la laisse filer: mettre Xavier Michel face à sa victime, le vrai Marc Voltenauer, bel et bien vivant. 

Par Ellen Ichters

DIFFICILE
Double angoisse


Keeping Two du bédéiste américain Jordan Crane nous emmène dans les pensées les plus profondes d’un couple, chacun imaginant la mort  de l'autre dans un accident de voiture.

Par Didier Charlet/ms

       

FERTILE
Sex Story

Laetitia Coryn aux dessins et Philippe Brenot au scénario signent ensemble le best-seller L'incroyable histoire du sexe, un des premiers récits graphiques sur l'histoire de la sexualité. 

Par Didier Charlet/ld

       

INTRANQUILLE
Une histoire de violence


Sa préférée, de Sarah Jollien-Fardel, raconte l'histoire d'une narratrice confrontée à la brutalité de son père sur fond de montagnes en Valais. Un premier roman puissant où s'entremêlent violence, colère et survie, qui a remporté jeudi dernier le prix du roman Fnac et est en lice pour le Goncourt. 

Par ATS/mh

        
  • Le cycle de conférences de la Société de lecture de Genève démarre mardi prochain avec comme invité Jean-Marie Rouart, auteur d'un grand nombre de romans et biographies, dont Les feux du pouvoir et Ils ont choisi la nuit. Le thème de la journée: Justice et littérature, un lien mystérieux. 
    Genève, Société de lecture, ma 20 septembre, 12h buffet, 12h-30-14h
LES ARCHIVES AUDIO DE QWERTZ
Ont collaboré à ce numéro
Didier Charlet, Jean-Marie Félix, Sophie Grecuccio, Nicolas Julliard, Ellen Ichters, Layla Shlonsky, Anik Schuin, Sylvie Tanette.


Crédits photographiques
Corinne Desarzens © DR 
Polina Panassenko: © Patrice Normand
David Lopez: © Bénédicte Roscot
Sarah Jollien-Fardel: © DR
Nous écrire
Facebook
Instagram
Twitter
Site web
Copyright © 2022 Radio Télévision Suisse, Tous droits réservés.

Notre adresse est:
Radio Télévision Suisse
20, Quai Ernest-Ansermet
Case postale 234
Genève 1211
Switzerland

Ajoutez-nous à votre carnet d'adresses


Voulez-vous changer la manière dont vous recevez ces messages?
Vous pouvez
mettre à jour vos préférences ou vous désinscrire de cette liste.

Email Marketing Powered by Mailchimp


Charte de confidentialité