Le cinéma lorgne TikTok ! | | « Le 3 octobre, il m'a demandé quel jour nous étions... Nous sommes le 3 octobre ! » Cette réplique, qui tourne en boucle sur TikTok ces derniers jours, est issue du film Mean Girls (Lolita malgré moi, en VF), un teenage movie des années 2000 qui a refait surface sur le réseau chinois en ce jour devenu culte pour tous ses fans. Un coup d'éclat de 24 h à plusieurs millions de vues, mis en scène par le studio Paramount avec une idée simple : créer un compte officiel pour son film et le proposer en intégralité (1 h 47) sur la plateforme, gratuitement, dans une version découpée en 23 clips. Piratage et promo à gogo Une approche novatrice, qui reprend les méthodes de ces pirates qui pensent s'affranchir des droits en matière de propriété intellectuelle en tronçonnant les films en une multitude d'extraits courts. Et qui est tout sauf anodine, selon le média The Verge : « Plutôt que de laisser quelqu'un d'autre récolter toutes les vues via les algorithmes de TikTok, Paramount espère battre les pirates à leur propre jeu. Ce n'est pas n'importe quel studio – c'est un studio cool. » Cool, mais pas fou : le 4 octobre au matin, tout le contenu avait été supprimé du compte. Paramount Pictures qui, accessoirement, prépare un reboot de Mean Girls sous la forme d'une comédie musicale prévue pour janvier 2024 dans les salles américaines, n'est pas le premier studio à mettre les doigts dans la prise TikTok pour assurer sa promo. En août dernier, le studio Peacock avait posté le premier épisode de la série Killing It pour élargir son audience et surtout annoncer le lancement imminent de la saison 2... Un mois plus tôt, c'est Apple TV qui flirtait avec la barre des 30 millions de vues après la diffusion du pilote de sa série Silo sur X. Simple technique de marketing agressif de la part des studios, ou véritable piste pour diffuser leurs films et diversifier leurs sources de revenus ? Quelque part entre les deux. « Un manque de respect » « Un représentant de Paramount nous a confirmé dans un mail que cette diffusion pendant 24 h de Mean Girls sur TikTok visait à faire exister le film dans l'esprit d'un nouveau public potentiel », écrit le New York Times dans cet article qui précise que la démarche a fait grincer les dents du syndicat des scénaristes américains, qui sort à peine d'une grève longue durée (146 jours) pour des questions de protection des droits d'auteur. C'est le cas de Rebecca Green, productrice des films It Follows et I'll see you in my dreams, qui a confié que certains cinéastes accueillaient l'idée qu'un studio puisse découper un film en plusieurs parties et le rende accessible gratuitement comme un « manque de respect ». Le message qu'elle a posté sur X est sans équivoque : « Alors que la grève de la WGA touche à sa fin, les studios trouvent d'autres moyens de ne pas nous payer pour notre travail. Et si vous croyez que les gens ne regarderont pas le film de cette manière, vous n'êtes de toute évidence pas sur TikTok ». Après TikTok Shop, TikTok Book et TikTok Music, bientôt TikTok Movie ? Réponse dans le prochain teaser... | | | JUNGLE STORIES | Comment les marques racontent la France Et si les prises de parole des Renault, SNCF et autres McDonald's influençaient subrepticement la manière dont nous nous représentons collectivement la France et les Français ? C'est la thèse que défend Raphaël LLorca dans son dernier ouvrage, « Le roman national des marques ».
Pour lui, la défaillance narrative des politiques - incapables de porter un discours cohérent et articulé sur ce qui travaille le pays en profondeur - ouvre l'espace à de nouveaux conteurs, souvent négligés lorsqu'il s'agit d'analyser la société française contemporaine : les marques commerciales. Voir le replay du live | | UN PAVÉ DANS LA JUNGLE | Selon la dernière édition de l'étude Born Social menée par l'agence de conseil en marketing digital Heaven, en partenariat avec l'association Génération numérique, « l'usage de la grande majorité des plateformes est en décroissance par rapport à l'année dernière » chez les moins de treize ans. 71% d'entre eux déclarent utiliser régulièrement au moins un réseau social, contre 86% l'an passé, soit un recul de quinze points. Sur les cinq applications les plus utilisées par cette tranche d'âge – toutes interdites aux préados -, seul YouTube reste stable, pendant que TikTok, Instagram, Snapchat et WhatsApp accusent tous une baisse de leur utilisation régulière. Pourquoi c'est un pavé ? « C'est la première fois en huit ans que notre baromètre, dont la méthodologie n'a pas changé, enregistre une baisse de cet usage. Nous en sommes les premiers surpris ! », confesse Arthur Kannas, directeur d'Heaven dans les colonnes du Figaro. De quoi confirmer que les campagnes de sensibilisation aux effets néfastes d'une exposition excessive aux réseaux sociaux commencent à porter leurs fruits ? « Ces discours très médiatisés ont cristallisé l'attention des parents. La peur domine, acquiesce Anne Cordier, chercheuse spécialiste des usages des adolescents, qui note un biais dans l'étude, toujours auprès du Figaro. C'est du déclaratif. Les enfants ont intégré qu'ils ne devaient pas être sur les réseaux sociaux et sont bien plus réticents à l'avouer qu'auparavant. » D'autant que 46% des enfants interrogés déclarent aussi qu'ils aimeraient pouvoir passer plus de temps sur leurs smartphones (+14 points en un an). Alors que les réseaux sociaux interdisent depuis longtemps aux moins de treize ans de s'inscrire et que la tendance est donc clairement à la vigilance, la baisse ne serait potentiellement pas aussi significative qu'annoncé. Sans doute parce que, comme le devine Arthur Kannas : « In fine, ce sont les parents qui décident. » | UN FORMAT À LA LOUPE | | Benoit Raphael, qui se définit lui-même comme « ancien journaliste, entrepreneur, et aujourd'hui éleveur de robots chez Flint.media » – sa boîte qui utilise l'intelligence artificielle pour créer des newsletters automatisées –, va lancer son « nouveau bébé ». Baptisé Génération IA, ce « média humain & IA » mise sur plusieurs profils de robots – les extracteurs, les analystes, les rédacteurs et les vérificateurs – pour assurer une production « journalistique ». « De mon côté, j'interviens à chaque étape du process pour valider les sources, stimuler l'IA sur certains angles (ou les questions qu'elle doit se poser), vérifier que tout est correctement édité et sourcé, précise Benoit Raphael dans un post publié sur son compte LinkedIn. [...] Vous me direz : quel intérêt ? Pourquoi ne pas tout faire écrire par un humain ? D'abord pour ouvrir un débat. Mais aussi pour voir si nous pouvons créer des formats journalistiques nouveaux, et complémentaires des humains, qui bénéficient de la spécificité des IA : par exemple traiter l'information de façon neutre et équilibrée. Tout en nous faisant gagner du temps pour créer, penser, et faire évoluer le média vers une plus grande profondeur et utilité. Bon... ça c'est le message. En réalité, on a VRAIMENT galéré. Faire écrire des trucs de base à l'IA c'est facile. Lui faire écrire des analyses intégrant du raisonnement et une certaine identité littéraire, c'était un vrai défi. Mais on est assez fiers de ce premier jet et des questions qu'il ne va pas manquer de poser. » On imagine que les journalistes en auront quelques-unes... | LE CONTENU QU'ON AURAIT ADORÉ FAIRE | | Amis membres de la confrérie du Uno, imaginez des cartes +6 et +10, des règles aussi folles que la mort subite pour tout joueur qui détient plus de 25 cartes, l'échange de main avec un adversaire dès qu'on pioche un 0 ou un 7, ainsi qu'une « Wild Color Roulette » qui vous oblige à piocher jusqu'à tirer la couleur désirée... C'est bon ? Vous la voyez, la soirée entre amis qui tourne au vinaigre ? La grand-mère qui vous déshérite ou votre moitié qui vous quitte ? Eh bien sachez que ce cauchemar porte désormais un nom : le Uno version « Sans pitié ! » (« Show'em No Mercy », en VO). Et pour annoncer sa commercialisation, l'équipe de com' du cultissime jeu de cartes distribué par Mattel a eu une idée lumineuse : publier une (très courte) vidéo sur son compte X, qui montre des (fausses) images volées d'une réunion au sommet dans le Uno HQ... Le tout accompagné de la mention « Things are about to get ruthless. I've said too much... ». UNOOOOO !!! | UNE DERNIÈRE LIANE POUR LA ROUTE | Pour ceux qui vivent dans un monde sans Omar Sy, il vous a sans doute échappé que la troisième saison de la série Lupin est sortie jeudi dernier sur Netflix. Pour les autres, vous l'aviez sûrement vu arriver en découvrant la campagne d'affichage où ce bon vieux Assane Diop avait dérobé tous les bijoux sur les visuels des grandes marques de joaillerie françaises, ne laissant que les marques de bronzage sur les doigts et poignets de ses victimes. Ou encore la « Lupin Experience », sorte d'escape game interactif concocté par la firme qui fait « Tudum ! ». Un contre-la-montre de dix minutes qui vous plonge dans le repaire parisien du gentleman-cambrioleur et vous propose de l'aider à préparer ses prochains coups en mettant la police sur de fausses pistes. L'occasion aussi de découvrir des indices inédits qui, spoiler alert, permettront peut-être aux petits malins que vous êtes de percer les secrets de cette nouvelle saison avant tout le monde. Et ça, c'est chouette. |
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