Le malheur des Juifs sonnera-t-il le réveil de la France ? Chronique publiée le jeudi 2 novembre 2023 « Heureux comme Dieu en France », disait autrefois le bel adage des Juifs ashkénazes qui, d’Allemagne, de Russie ou de Pologne, espéraient trouver à nos côtés la promesse de la tranquillité et du respect. Voilà le rêve évanoui. La bête à demi ensommeillée s’est réveillée il y a plus de vingt ans. Elle est désormais déchaînée. Ce que Jules Isaac avait appelé « l’enseignement du mépris » est réapparu, non pas sous la forme de l’antijudaïsme d’avant-hier, mais sous celle d’un antisionisme d’importation, issu des dérives d’une immigration arabo-musulmane. Au vieux ragoût pétainiste et lepéniste se sont ainsi substituées les salissures verbales et les souillures innombrables d’un nouvel antisémitisme nourri par l’islamisme, proliférant sur le net et dans les têtes faibles. Aux injures, aux insultes et aux provocations du quotidien se sont bientôt ajoutés les violences, les agressions et même les meurtres : les crétins ont été les complices des assassins. On a crié « mort aux Juifs » dans les rues de Paris. Et à force de regarder ailleurs, de ne voir ni les foyers d’antisémitisme couvant dans des banlieues déstabilisées par l’immigration de masse, ni les noces funestes de l’islamisme et du gauchisme, on a armé les bras des meurtriers qui ont torturé et tué Ilan Halimi en 2006, massacré les enfants et le professeur de l’école Ozar Hatorah de Toulouse en 2012, tiré sur les otages de l’Hypercacher en 2015, roué de coups et défenestré Mireille Knoll en 2018 – cette dame, elle-même rescapée de la Shoah, qui avait épousé un survivant d’Auschwitz mais qui n’aura pu échapper à Paris, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans, au retour de la haine des Juifs. Ces derniers jours hélas, le feu s’étend à vive allure. Israël a été attaqué en son cœur par des barbares semant la terreur. Jamais autant de Juifs n’avaient été massacrés depuis la défaite des nazis. Les islamistes du Hamas et d’ailleurs sont leurs continuateurs. Sur la terre d’Israël, d’abord, mais aussi ici, chez nous, partout. A Paris, à Saint-Ouen, à Aubervilliers, cette semaine, des étoiles de David ont été tracées sur les murs où résident des Juifs. Dans les écoles, les synagogues, les centres communautaires, la peur du pogrom est revenue. Dans les transports en commun, dans les taxis et les VTC, dans la rue, et même chez eux lorsqu’ils ouvrent leur porte pour recevoir une livraison, nos compatriotes juifs craignent à tout moment d’être agressés. Voilà la France de 2023. Comment ne pas en avoir honte ? Qu’avons-nous fait de notre pays ? A rebours des catégories maurrassiennes, je sais que les antisémites sont l’anti-France et que, pour cette raison, nous les vaincrons. Mais quand ? Notre État sera-t-il assez fort, les armes de notre droit seront-elles assez puissantes, la volonté de notre société sera-t-elle assez ferme pour que nous ne soyons pas à nouveau condamnés à replonger, pour un temps, dans la nuit et le brouillard ? Il est vital que deux clarifications soient opérées sans faiblesse. La première urgence est diplomatique. Sur la scène internationale, en effet, la France doit en finir avec les palinodies d’une diplomatie présidentielle sautillante et confuse, guidée par la peur de répercussions intérieures, disant tout et son contraire selon les interlocuteurs. On l’a encore vu le 27 octobre aux Nations unies, avec le vote stupéfiant de lâcheté, par le représentant du gouvernement, d’une résolution présentée par la Jordanie au nom du groupe arabe, ne condamnant pas l’attaque terroriste du Hamas et n’appelant pas à la libération des otages. Tant que le Hamas et les autres factions terroristes menaçant l’existence même d’Israël n’auront pas été neutralisés, les traditionnels éléments de langage du Quai d’Orsay déclinant ce qu’il est convenu d’appeler la « politique arabe de la France » sont tragiquement inopérants. Quant à la perspective hypothétique de la création d’un État palestinien, elle restera absolument chimérique tant que les Palestiniens eux-mêmes et les États arabes qui les soutiennent ne seront pas capables de faire émerger une élite raisonnable et responsable acceptant l’existence d’Israël. C’est pourquoi nous n’avons qu’une seule ligne à tracer, claire et droite : c’est celle d’une totale solidarité avec l’État et le peuple d’Israël, ciblés par notre ennemi commun, l’islamisme. Au plan national, ensuite, nous devons nous réarmer contre l’antisémitisme, sans nous payer de mots. Nous devons traquer ses agents par tous les moyens du droit (y compris lorsque des députés ou des dirigeants de l’extrême-gauche se livrent à des provocations à la haine et qu’ils doivent, par conséquent, en répondre devant le juge pénal). Nous devons, de même, arrêter l’immigration de masse telle qu’elle a été subie depuis cinquante ans. Trois quarts des Français, selon les études d’opinion, sont favorables à ce coup d’arrêt. Cessons de nous en excuser ! Nous avons le droit et le devoir de ne pas souhaiter accélérer l’importation de l’islam politique et de tous les troubles qu’il suscite. Plutôt que d’augmenter encore les flux d’immigrés en provenance des pays arabo-musulmans, consacrons nos efforts à l’intégration et l’assimilation, à notre communauté nationale, des populations issues de l’immigration. Tâchons enfin, ce qui sera plus difficile encore, d’éveiller les consciences, d’éduquer les générations à venir, pour que l’antisémitisme retourne dans les poubelles de l’Histoire. C’est une œuvre immense qui nous attend. Cessons de procrastiner. Nous n’avons pas le droit à l’indifférence. Le malheur des Juifs sonnera-t-il le réveil de la France ? Saurons-nous défendre notre civilisation, telle que nous l’avons tant aimée ? L’heure de vérité approche. Un vers de Paul Valéry nous invite à poursuivre le chemin : « le vent se lève, il faut tenter de vivre ». ________________________ |