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Les voeux contradictoires du Ministre de l’agriculture (VD)Chère amie, cher ami, Le Ministre de l’agriculture se porte bien. Il vous souhaite une bonne année. Pour la santé… Il faudra repasser. L’année prochaine sans doute. Lui, de toute façon ne sera pas là. Je me suis rendu aux voeux du Ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Monsieur Didier Guillaume, présentés devant le monde agricole. Comme il est également candidat à la mairie de Biarritz, et qu’il doit bien faire un peu campagne, certains ont fait du mauvais esprit. Ils ont dit qu’il était “à mi-temps”. Il a précisé ne pas avoir apprécié. Et pourtant, il est sympathique, cet homme-là. C’est un politicien pur jus. A l’ancienne. Il rappelle Jacques Chirac. Il sourit beaucoup, il plaisante. Il parle à tout le monde. Et puis, il est pour le dialogue, pour la transition écologique, contre le réchauffement climatique, conscient de la déprime des agriculteurs… En fait, cet homme-là est conscient de tout. Il est lucide. Il a un mot, une attention, un sourire, une poignée de main pour chacun. Il fait son boulot. L’exercice n’est pas si facile. L’ennui, c’est que la situation exige peut-être un discours plus clair et surtout plus volontaire... Les consommateurs sont présentsJe me suis rendu aux vœux pour le compte de l’association “Consommateurs pas cobayes”. En effet, Bernard Astruc, agro-écologiste et membre actif de l’association, avait participé aux Etats Généraux de l’Alimentation en 2017. A ce titre, il a reçu une invitation. Comme il ne pouvait s’y rendre, je l’ai remplacé. Bernard est extrêmement actif dans la défense et la promotion de l’agriculture biologique. Il a été l’un des instigateurs du projet Oasis Réunion que nous avions soutenu l’année dernière. L’idée est simple : faire de l’île de la Réunion le premier département bio de France (le sujet avait été évoqué ici). Il est toujours possible de signer la pétition ici. Et comme les autorités souhaitent depuis plusieurs années associer les consommateurs aux débats sur l’agriculture et l’alimentation, nous les avons pris au mot ! S’agit-il d’une mesure cosmétique pour amadouer les associations ? Peut-être. Une chose est sûre : les actions menées sur le terrain ont eu une incidence directe sur le discours du Ministre. Dans son allocution, Didier Guillaume parle beaucoup de transition écologique, de réchauffement climatique, de bien-être animal et de la pêche. Il cherche à faire la synthèse des demandes de tout le monde : consommateurs, lobbies professionnels et agriculteurs… Cela donne un discours plutôt contradictoire ! Ces contradictions ont le mérite de montrer que rien n’est facile sur le terrain. Elles traduisent par ailleurs des divergences de fond qu’il faudra bien trancher un jour, et sans doute plus vite que prévu. Pour l’instant, le Ministre et le Gouvernement semblent davantage soucieux de maintenir un certain statu quo plutôt que de lancer la grande révolution agricole qui s’impose et telle que les États Généraux de l’Alimentation la prévoyaient en 2017. Les entreprises agro-alimentaires face aux agriculteursLe Ministre souligne l’importance des entreprises de l’agro-alimentaire qu’il cite à plusieurs reprises. Ce sont des entreprises présentes sur l’ensemble du territoire français qui constituent une valeur sûre de notre économie. Didier Guillaume concède un léger problème dans les négociations commerciales, dont le résultat depuis de longues années est que l’industrie s’en sort relativement bien tandis que beaucoup de producteurs vivent dans la misère. Il n’évoque pas la grande distribution... Il estime pour autant que la loi Égalim, votée par la législature actuelle, a fixé un cadre qui permet le dialogue. Selon lui, la dernière réunion sur les négociations commerciales - ces réunions ont lieu tous les deux mois - s’est plutôt bien déroulée… Hum… Tout cela ne sent pas la franche évolution en faveur des agriculteurs… Mais sans changement profond de cap, est-il vraiment possible d’espérer une amélioration de leur condition ? Hypertension : prenez-vous un médicament pour rien ?Savez-vous qu'à certaines doses le paracétamol ou certains anti-inflammatoires peuvent être nocifs pour la santé ? Sans doute.Mais ce que l'on connaît moins, c'est la dangerosité des traitements contre l'hypertension ! Aggravation des problèmes de tension, ou pire, création de nouveaux problèmes de santé... Ces médicaments peuvent mettre votre vie en danger. Heureusement, il existe une approche personnalisée pour agir sur votre hypertension. Cliquer ici pour la découvrir. Suite de la lettre de ce jour : Agriculture bio contre révolution verteLa révolution verte, c’est l’histoire d’une des plus grandes escroqueries de tous les temps. Escroquerie parce que l’appellation choisie est exactement contraire à la réalité décrite par le type d’agriculture à laquelle l’expression « révolution verte » fait référence. Il s’agit du passage d’une agriculture basée sur l’agronomie traditionnelle, souvent vivrière et diversifiée, à une agriculture intensive misant sur des céréales à haut rendement et l’utilisation massive d’engrais chimiques et de pesticides nocifs. Ces pesticides tuent les insectes, les champignons, les parasites en tous genres. Là encore pour faire bonne figure on les a appelés « phytosanitaires ». Cela sonne naturel et propre. C’est 100% artificiel, chimique et polluant. Cette agriculture est le modèle dominant. Elle est plus ou moins intensive d’un pays à l’autre. On a appelé « révolution verte » le fait que des pays en voie de développement aient épousé ce modèle en très peu de temps. Mais en France, la révolution a bien eu lieu aussi. Elle a été relatée dans un documentaire saisissant nommé « Soigneurs de terre », passé sur France 2 il y a quelques années[1]. Cette vidéo explique comment en quelques années, on a arasé les haies sur 750 000 km, mécanisé à outrance, irrigué en quantité et gravement endetté les agriculteurs. Ils ont été obligés d’acheter du matériel hors de prix, d’opter pour des semences de variétés agricoles imposées par le système de subvention européen, de s’endetter pour acheter des engrais et des pesticides… Avant même d’avoir produit quoi que ce soit, ils étaient endettés… Pendant 30 ans, le miracle a eu lieu, sous l’effet conjugué d’une fertilité encore présente et des intrants chimiques. Les rendements ont augmenté. Puis, ils ont commencé à stagner dans les années 90. Aujourd’hui, partout dans le monde ce modèle montre ses limites. Les rendements ne sont plus au rendez-vous[2]. Les sols s’appauvrissent. Résultat : il faut encore plus d’engrais, plus de pesticides, plus d’irrigation. A l’inverse l’agriculture biologique : évite aux agriculteurs d’avancer de l’argent pour payer des engrais chimiques[3] ;libère les agriculteurs de l’emprise des semenciers[4] ; limite le besoin en pesticides, remplacés le cas échéant par des alternatives naturelles et biodégradables[3] ; permet, après plusieurs années d’investissement, d’obtenir des rendements compétitifs[5] ; permet de mieux rémunérer les agriculteurs[6] ; assure une bonne gestion de l’eau[7] ; nourrit les sols et assure la rotation des cultures[3] ; crée de nouveaux emplois non-délocalisables et valorisants pour les personnes. C’est un véritable cercle vertueux ! Bref, l’agriculture biologique, la permaculture et l’agroécologie permettent parfaitement de répondre aux défis de l’agriculture contemporaine, c’est à dire : nourrir les populations ;respecter les sols pour éviter leur érosion ; stocker le CO² ; éviter la pollution des sols et la lente intoxication des populations créer des emplois. Le Ministre sait tout cela. Mais il sait aussi qu’il faut du temps pour assurer les transitions. Sa grande phrase des vœux est : “Il faut ralentir le temps court et accélérer le temps long”. En clair : se donner du temps aujourd’hui, et faire payer ceux qui viendront demain. Eux n’auront plus la possibilité de “ralentir le temps court”… Après tout, pourquoi faire aujourd’hui, ce qui pourrait être fait demain ? Désespoir et dignité des agriculteurs face aux évolutions de la sociétéLa grande inquiétude du Ministre, c’est le désespoir des agriculteurs. Il le répète à plusieurs reprises dans son discours. Il exprime sa colère contre “l’agri-bashing” et montre toute son empathie pour ceux qui travaillent la terre, ainsi que tous les métiers dépendant de son ministère comme les pêcheurs, les ostréiculteurs et les forestiers. Evidemment, il a raison. Le désespoir des agriculteurs est insupportable pour tous les Français. Chaque Français ou presque a des grands-parents ou arrières grands-parents agriculteurs. La France est depuis toujours un pays paysan. Mais, il est évident que le tournant pris dans les années 70 a changé la donne. Ce modèle-là, qui n’est pas le modèle traditionnel français, fait d’un savant mélange entre élevage, prairie, sylviculture et polyculture, est un modèle inadapté. Il doit évoluer. Et le plus vite il évoluera, le mieux ce sera pour tout le monde. Cela commence par exemple par une meilleure gestion des aides dévolues à l’agriculture bio. Pendant deux ans, tous ceux qui avaient converti leurs fermes en bio n’ont pas reçu leurs subventions en temps et en heure avec des conséquences dramatiques allant jusqu’au dépôt de bilan voire au suicide. Ce problème n’a touché que l’agriculture biologique. Et les médias en ont très peu parlé. Le Ministre non plus n’en parle pas. Il ne parle pas non plus des agriculteurs malades d’avoir utilisé trop de pesticides. Ce sont des cancers de la vessie, des maladies de Parkinson, divers troubles neurologiques que l’on attribue de plus en plus aux méthodes agricoles et notamment aux pesticides[8]. Voilà une autre raison pour les agriculteurs de ne pas être très heureux de leur métier. Ils s’empoisonnent en travaillant ! Alors, oui, il faut des nuances, il faut du dialogue, il faut du respect et de l’amour, tout cela a été réclamé par le Ministre. Mais il faut avancer aussi, car en attendant, la situation sanitaire des sols et des hommes et des femmes qui le travaillent se détériore chaque jour. Bœuf français contre Plan Protéines VégétalesPour sortir l’agriculture de l’ornière, le Ministre vante la nécessité de continuer à développer les filières de qualité. Malgré ses fragilités, l’agriculture française a une bonne réputation à l’étranger. Il vante ainsi la possibilité de mieux vendre le bœuf français aux Chinois. Dans le même temps, le Ministre évoque le Plan Protéines Végétales. Là encore, j’y vois un paradoxe. Evidemment, si le bœuf français se vend en Chine, ce sera bon pour les éleveurs. Et personne ne souhaite de tort aux éleveurs, pas moi en tout cas. Toutefois, quand le Ministre dit cela et qu’il évoque vaguement le Plan Protéines Végétales, il n’est plus très crédible. Qu’est-ce que le Plan Protéines Végétales ?[9]L’idée est simple : miser sur la culture de légumineuses, plantes “naturellement riches en protéines qui enrichissent les sols en azote et diminuent leur besoin de fertilisation azotée” [9]. En clair, vous plantez un rang de céréales et un rang de légumineuses, cela vous donne une double culture qui enrichit le sol au lieu de l’appauvrir. L’objectif, c’est aussi d’éviter l’importation de soja et de maïs OGM qui représente l’essentiel du nourrissage des bêtes en France, notamment, en hiver[10]. Vous pensez ne pas consommer d’OGM ? Détrompez-vous si vous prenez de la viande et qu’elle n’est pas bio, il y a de fortes chances que vous en avaliez régulièrement… Dans cette perspective, l’idée est aussi de faire évoluer les mentalités. Nous consommons beaucoup plus de viande que nécessaire. Consommer plus de légumineuses ou de champignons et un peu moins de viande est bon pour votre santé et pour l’environnement. En revanche, prendre du bœuf une fois par mois reste recommandé[11]. A ce rythme, très raisonnable, vous pouvez choisir de la qualité ! Et certains éleveurs se sont organisés pour proposer des modes d’élevage éthiques et respectueux des vrais besoins physiologiques des animaux. Voyez par exemple le site Internet le Bœuf d’herbe ici.[12] Exception agricole française contre traités internationauxLe Ministre citant le Président de la République, évoque “l’exception agricole française.” C’est un clin d’œil à “l’exception culturelle française”. Jacques Chirac, là encore. Dans la mesure où la France est soumise à la PAC, la politique agricole commune qui est la plus intégrée des politiques européennes, il est permis de se demander de quoi il s’agit. Le Ministre ne précise pas. En revanche, il estime qu’au nom de cette exception, il est plus facile de négocier les traités et accords internationaux. La France pourrait se prévaloir d’une position particulière. N’est-ce pas un peu rhétorique ? Car en attendant, le CETA, l’accord avec le Canada est signé. Le Ministre dit que le Mercosur, l’accord avec l’Amérique du Sud, ne le sera pas mais cela n’engage que lui. Et par ailleurs, au niveau européen rien n’a changé… La recherche française évolueEnfin le Ministre a mentionné avec enthousiasme la création de l’INRAE, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. Ce nouveau centre de recherche est le fruit d’une fusion entre deux administrations : l’INRA et l’IRSTEA. Didier Guillaume y voit la naissance d’un géant de l’agroécologie et de l’agronomie ! Espérons, en effet, que cette initiative donne un élan nouveau à la recherche en France qui en a besoin. Visiblement, pour les autorités, réformer l’administration reste plus facile que de faire évoluer le terrain ! Naturellement vôtre, Augustin de Livois
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