" C’est qui ? La femme de Jackie Chan ? " " Le Nobel-Woke est mérité ! " " J’espère qu’elle écrit mieux que la Ernaux ! " " Un camouflet à Murakami ! " etc… Chaque année, à l’annonce du Prix Nobel de littérature, les commentaires vont bon train. Et lorsqu’une femme asiatique est primée, le racisme ordinaire s’allie à la misogynie pour un festival de saillies pitoyables. Prévisible, le phénomène en dit long sur les attentes du public: car au fond, de quoi le prix Nobel doit-il être le nom ? Consécration suprême d’une vie créatrice à l’approche du trépas, ou révélation d’une plume importante et méconnue ? Tactique géopolitique ou manifeste esthétique ? En choisissant de primer une romancière sud-coréenne, l’académie suédoise déjoue les pronostics usuels et les désirs de confirmation populaire. Relativement jeune (53 ans), autrice d’une quinzaine de romans dont un tiers est traduit en français, Han Kang sera, pour beaucoup, une découverte. Son roman le plus célèbre, La Végétarienne (Le Serpent à Plumes, 2015), représente une bonne porte d’entrée dans son monde de fiction, théâtre cruel où les corps éprouvent leur résistance face à d’étouffantes injonctions familiales. De quoi convaincre les plus sceptiques, qui devraient se réjouir de voir ainsi leur panthéon personnel ouvrir ses accès à l’inattendu. Bonnes lectures et bonnes écoutes !
ensauvagée
Rêve de terre
Carole Martinez, Dors ton sommeil de brute, ed. Gallimard Chaque nuit, tous les enfants de la planète font le même rêve. Ce cri, fait de menace, de chute et de hurlement, galope au rythme de la rotation de la Terre, amenant avec lui des désordres nouveaux. Ce songe collectif serait-il une tentative désespérée des esprits de la nature de communiquer avec l’humanité ? Alors qu’Eva tente de sauver sa fille, émerge la compréhension que pour soigner les enfants, il faut d’abord soigner la Terre. Par Sarah Clément
Fabrice Caro, Fort Alamo, ed. Gallimard Un jour, alors qu’il attend à la caisse d’un supermarché, le narrateur se fait couper la priorité par un malotru. Mais voilà que dans la seconde qui suit, l’impoli s’effondre, foudroyé, mort. Le narrateur aurait-il le don de supprimer tout individu dérangeant ? Comment alors éviter le carnage ? Dans Fort Alamo, Fabrice Caro met une nouvelle fois l’absurde au service de questions profondes. Par Sylvie Tanette
Alix Garin, Impénétrable, ed. Le Lombard À la suite du décès de sa grand-mère, Alix, pourtant en couple harmonieux avec Lucas, souffre de douleurs inexplicables lors des rapports. Le diagnostic est sans appel : elle souffre de vaginisme. En cherchant à soigner cette pathologie, Alix Garin va entamer une odyssée de l’intime et progressivement défaire les entraves personnelles et systémiques qui empêchent l’accès au plaisir. Par Ellen Ichters
Basé sur le roman éponyme du Mexicain Mario Bellatin, Salon de beauté en est la version graphique conçue par Quentin Zuttion. Cette bande dessinée dépeint le quotidien de Jeshua, propriétaire d'un salon de beauté, dont la vie est rapidement bouleversée par une épidémie dévastatrice. Propos recueillis par Julie Evard Adaptation web: Sarah Clément
Riad Sattouf, Moi, Fadi, le frère volé, ed. Les livres du futur, 152 p.
Les aficionados de L’Arabe du Futur le savent depuis le tome 4 : Fadi, frère benjamin de Riad, se fait emmener de force en Syrie par leur père, pour en faire « un bon musulman ». Avec ce spin off de sa saga à succès, Riad Sattouf retrace l’histoire irracontable du petit Fadi, en couvrant dans ce premier tome les années 1986 à 1994. Malgré un petit air de déjà vu, c’est terriblement touchant de se plonger dans le quotidien de « Fadi le français », de retrouver des personnages connus comme la tante Khadija, les cousins à la tête difforme, les rues cabossées de Ter Maaleh ou encore l’interminable chantier de la villa de luxe d’Abdel Sattouf. On rit, on pleure, on a la gorge nouée. C’est extra. SG
roman étranger
Joyce Carol Oates, Boucher, ed. Philippe Rey, 480 p.
À la fin du XIXème siècle, le directeur d’un asile d’aliénées spécialisé dans la "gyno-psychiatrie", est persuadé qu’il faut retirer les organes génitaux des femmes pour calmer leur hystérie. Dans ce texte très documenté, la grande romancière américaine produit un effet de réel glaçant en composant une vraie-fausse autobiographie du praticien. Et le portrait de cet homme sûr de son bon droit quand il charcute au nom de la science, devient sous sa plume une dénonciation radicale du patriarcat, qui ravale le corps des femmes au statut d’objet. ST
essai illustré
Lucia Sillig, Game ovaire, ed. Helvetiq, 168 p.
Les guerriers vikings étaient aussi des guerrières. Chez les bonobos, ce sont les femelles qui quittent en solitaire le groupe. Il n’existerait pas de mâle alpha et la testostérone comme apanage ultime des hommes serait un gros mythe. Loin de se limiter à intégrer un excellent jeu de mots dans son titre, cet ouvrage propose de déconstruire les biais de genre qui, depuis des siècles, sous-tendent un grand nombre de théories scientifiques. Lucia Sillig, physicienne et journaliste à la RTS en dresse une synthèse richement documentée et irréfutable. EI
bande dessinée
Alain Ayroles et Richard Guérineau, L’Ombre des Lumières T02, Dentelles et Wampun, ed. Delcourt, 72 p.
Alain Ayroles nous avait époustouflés avec Les Indes fourbes , et il revient ici avec un personnage très antipathique, le Chevalier de Saint-Sauveur, dont l’Histoire a conservé les lettres. Ce noblaillon vit au XVIe siècle à Versailles. C’est un libertin, un malfaisant, un manipulateur qui ne cherche qu’à briller auprès du roi Soleil. Mais voilà, ces vilénies finissent par gêner et il déchoit. Conséquence de ses infortunes, le voilà expédié en Nouvelle-France, avec son valet et un sauvage. Un nouveau pari va lui permettre de jouer de tous ses talents de manipulateur pour revenir à la Cour de France. Mais les choses ne se passeront pas exactement comme il le pense. L’Ombre des Lumières est un nouveau coup de maître pour Alain Ayroles qui nous livre un récit épistolaire frais comme une bouffée de poudre de riz mâtinée d’odeur d’humus et de forêt. CF
Armelle croit avoir la berlue lorsque cette après-midi-là elle aperçoit son mari se faufiler dans l’Impasse de l’Union, alors qu’il est censé être au travail. Elle doit savoir : Léonard la trompe-t-il ? Avec qui ? Qu’a-t-elle raté dans leur relation pour qu’il aille vivre une vie double et paisible dans cette impasse, avec une femme qui lui ressemble étrangement ? Postée à la fenêtre d’une petite chambre de l’hôtel Hôtel, Armelle scrute, observe, et le mystère s’épaissit. Dans son dernier roman Le Trouble (ed. Slatkine), l’autrice romande Anne-Frédérique Rochat installe un jeu de regards, de miroirs et d’introspection aux allures hitchcockiennes. Animation : Ellen Ichters / Carte blanche : Pascaline Sordet Quartier Livre, RTS La Première, di 6 octobre
En cette rentrée littéraire, Quartier Livre vous propose de sonder la poésie romande avec un zoom sur deux œuvres fraîchement publiées. Trognes aux éditions de lʹAire et Commerce de bouches aux éditions Empreintes. Pour son premier recueil de poésie, lʹautrice et éditrice Xochitl Borel sʹempare de la métaphore de la trogne pour raconter le lien entre les humains et le vivant. Tandis que les poèmes issus de Commerce de bouches écrits par lʹauteur et enseignant Jérôme Meizoz, invitent le lectorat à plonger dans un univers critique, mordant et joueur. Quartier Livre, RTS La Première, di 6 octobre
Illusions perdues à Meyrin Metteuse en scène et comédienne française, Pauline Bayle réinvente Illusions perdues de Balzac par une mise enscène pleine d’audace.Dans ce « roman sur planches », qui raconte l’ascension etla chute d’un jeune poète ambitieux dans le Paris des années 1820, lesdialogues claquent, l’action s’emballe et la satire sociale – avec commecible le règne des apparences, les coups tordus et la corruption – estd’une savoureuse acuité. Théâtre Forum-Meyrin, me 16 et je 17 octobre, 20h30
Les Misérables à gagner! Après 39 années d’existence, la comédie musicale " Les Misérables ", qui porte sur scène la célèbre œuvre de Victor Hugo, sera présentée pour la première fois en Suisse romande en version anglaise avec surtitres en français. La RTS vous propose de gagner des billets, tentez votre chance et participer au tirage au sort en nous écrivant à l'adresse: qwertz@rts.ch. Aréna de Genève, vendredi 1er novembre, 20h