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Vendredi 17 janvier 2025

Des internautes ont compté : six fois. Le fameux « Hollywood Sign », ces lettres blanches surplombant Los Angeles, n’aurait été détruit que six fois dans des films catastrophes. L’image nous est si familière que l’on imaginait le bilan plus élevé. Symbole de la fin du monde, elle a été réactivée ces derniers jours dans le sillage du Palisades Fire en Californie. Quantité de fausses vidéos mettent en scène cet emblème du glamour et de la vie légère happé par les mégafeux, rattrapé par le réchauffement.

Dans la littérature, les incendies californiens commencent aussi à occuper une place privilégiée. Pour qui a lu « Le déluge », le dernier roman de Stephen Markley, les incendies qui dévorent Los Angeles suscitent une troublante impression de déjà-vu – ou plutôt de déjà-lu. Dans cette fresque sur le changement climatique publiée en France à l’automne dernier, l’auteur imagine une situation très proche de celle qui est en train d’advenir : un mégafeu pénètre dans la Cité des Anges jusqu’à menacer Hollywood. « Un grand réalisateur avait perdu ses deux maisons. Un rappeur exfiltrait sa garde-robe par camions entiers car les flammes se resserraient autour de Bel-Air. Le Getty museum descendait ses collections au sous-sol », écrit l’auteur qui place cette scène en 2031 et baptise son feu « El Delmonio ».

Markley anticipe les tentatives des plus riches d’échapper au désastre par la force de l’argent. « Pour se protéger, les habitants fortunés des collines d’Hollywood firent appel à des compagnies de pompiers privés qui recouvrirent leurs maisons de Phos-Chek, un ignifuge chimique développé par Monsanto. » Rien de tout cela n’est imaginaire : les millionnaires californiens peuvent déjà identifier grâce à l’IA les villas les plus exposées, mobiliser des pompiers privés, asperger leur maison de retardateur de feu, faire laver leur maison après la fin de l’alerte, etc. Spoiler : dans le roman, ça ne fonctionne qu’à moitié. « Une société baptisée Transpen Fire Services et sa concurrente Firestop, se disputèrent l’accès à l’eau. Résultat, les bouches d’incendie furent bientôt à sec. »

Mais c’est un autre détail qui interpelle. L’écrivain raconte comment les vidéos amateurs circulent, matérialisant ces scènes d’apocalypse et comment, sur l’une d’elles, « les images sont commentées par des spectateurs ivres, perchés sur un toit-terrasse ». Voici une belle métaphore de la manière dont nous regardons ces feux, éblouis, paralysés et idiots. Markley a plusieurs fois expliqué qu’il ne faisait que mettre en récit les projections scientifiques. Ce qui se déroule sous nos yeux n’a rien d’inattendu. Mais happé par le film, nous contemplons ces flammes comme si ce n’était que des décors de cinéma qui partaient en fumée. L’écrivain indien Amitav Ghosh avait théorisé cela : le monde dans lequel nous entrons est étrange, parcouru par des tornades de feu et des pandémies. Si étrange que nous avons tendance à le rejeter dans la catégorie de la science-fiction. C’est peut-être ce qui explique la prolifération des deep fakes ou des théories du complot. Le monde est devenu trop gros pour être vrai.

Rémi Noyon

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