Il n’y avait guère de suspense. Mercredi, l’assemblée générale de SGS a approuvé le déménagement à Zoug du géant de l’inspection et de la certification. Ni l’intervention d’un ancien conseiller d’Etat, ni celle de l’énergique directeur de la Chambre de commerce et d’industrie de Genève n’ont inversé le cours des choses. L’actionnariat très éclaté et surtout très international se moque bien de savoir si le siège se situe (depuis 1915) dans la cité de Calvin ou ailleurs en Suisse. Sur le fond, les actionnaires de SGS ont bien raison. La décision leur revient de manière souveraine. Pourtant, il leur manque une bonne raison, comme le souligne mon collègue Alain Bucher dans son éditorial. En effet, les arguments avancés par le groupe ne résistent pas à un examen critique. D’ailleurs, l’attitude de sa direction révèle un manque de confiance. L’arrogance qu’elle reproche à l’Etat ne se trouve-t-elle pas plutôt chez elle? Pourquoi, par exemple, a-t-elle refusé à la presse l’accès à l’assemblée générale, chose pourtant couramment admise parmi les grands groupes cotés? Une décision qui dénote un manque flagrant de transparence et ne peut qu’alimenter le doute sur le bien-fondé du déménagement. Nos lecteurs attentifs auront remarqué que L’Agefi s’y trouvait néanmoins. Cela grâce à l’achat, à notre demande, d’une action par notre reporter Nathalie Praz. L’avenir nous dira si, comme a averti l’ancien élu cantonal François Longchamp, SGS se retrouve confronté «à des procédures». En attendant, cette affaire qui pénalise Genève rappelle de manière douloureuse que la mobilité des entreprises est bien réelle. Et qu’il reste essentiel de maintenir les conditions cadre, fiscales et autres, les plus attractives. A propos d’avenir, combien de temps les Etats-Unis conserveront-ils le privilège du dollar, devise de réserve par excellence? La politique économique de Donald Trump, faite d’agression commerciale et, bientôt, fiscale, pourrait remettre en cause ce statut d’exception. Elle fait en tout cas douter les stratégistes de l’Isag, l’association genevoise des responsables de l’investissement au sein des banques de la place. Dans leur débat trimestriel avec L’Agefi, leurs représentants avouent ne plus considérer le billet vert comme absolument sûr. C’est inédit. Mais qu’on ne s’y trompe pas. Pour erratiques qu’elles puissent paraître, les décisions du président américain suivent une vraie logique, qu’expliquent les trois stratégistes, Marco Bonaviri, Arthur Jurus et Adrien Pichoud. Une logique certes potentiellement destructrice, mais qui ne rencontre pour le moment aucune force de rappel, Donald Trump restant – en apparence – indifférent à la réaction (négative) de Wall Street. Dans ces conditions, et afin de pouvoir absorber les chocs en provenance de Washington, il importe que la Suisse consolide ses atouts. La compétitivité de la place financière, leader mondial de la gestion de fortune transfrontalière, en fait partie. Pourtant, elle ne semble guère intéresser Karin Keller-Sutter (KKS). Comme le relève notre correspondant à Berne Jonas Follonier, la conseillère fédérale en charge des Finances s’engage moins que son prédécesseur dans la promotion de sa place. Là où Ueli Maurer partait en voyage avec des délégations du secteur, la ministre se déplace en solo ou reste à Berne. Cette déconnection inquiète plus d’un banquier. Enfin, si comme KKS, vous avez besoin de vous réconcilier avec la finance, je vous recommande la lecture de la dernière édition de notre magazine Agefi Finance. Vous pourrez notamment y lire une grande interview de Valérie Noël, pétillante responsable du trading chez Syz et chroniqueuse régulière dans nos colonnes, qui vous expliquera comment ajuster vos portefeuilles face aux «Trumponomics». |