Premier roman d’une brutale intensité, Le Tube de Coolidge marque la naissance d’une nouvelle voix, celle de Sonia Hanihina, agrégée de lettres et dramaturge qui prête ici sa langue poétique à Mona, jeune fille devenue femme dans la violence et les cris d’un foyer éclaté. S’édifiant une cathédrale en noir et blanc des clichés radiographiques de sa mère, Mona découvre progressivement les zones d’ombre de ce sanctuaire piétiné par la folie sanguinaire de son père. Retraçant l’histoire de sa famille et se confrontant aux non-dits qui les ont tous trop longtemps contraints au silence, Mona réapprend à aimer son héritage et à faire entendre sa voix.
Spirales traumatiques Avec ses courts chapitres qui s’égrènent telles les perles d’un funeste chapelet, Le Tube de Coolidge se fait la traduction de la fuite désespérée. Cette fuite, c’est celle de Jeanne, dont les rêves, comme le corps, ont été piétinés par la rage inextinguible d’un époux aux lèvres écumant du poison de la rancœur. Témoin de la lente déchéance de son père, et de l’inexorable délitement du couple formé par ses parents, Mona est une femme qui veut comprendre. Face aux clichés radiographiques du corps meurtri de sa mère, Mona sait qu’il va lui falloir se confronter aux traumas familiaux. Une leçon à laquelle les générations précédentes sont restées sourdes, elles qui portent en leurs cœurs les cicatrices visibles et invisibles laissées par les guerres comme autant de bombes à retardement prêtes à tout désintégrer sur leur passage. Avec une précision aussi poétique que brutale, Mona décrit la peur, la solitude et ces mécanismes de survie qui obligent à se protéger dans le silence, à marcher à pas feutrés dans les ténèbres pour ne pas attirer la foudre paternelle. Elle dit aussi tout de la complexité des sentiments, notamment ceux de sa mère qui conserve longtemps au cœur l’espoir fou de voir renaître les promesses d’un amour au goût d’été et qui, malgré la fuite et la renaissance, gardera toujours en elle une part d’obscurité. |