C’est un scoop que vous avez pu lire dans L’Agefi. Philip Morris International défie le Valais en justice, a révélé cette semaine ma collègue Laure Wagner. Le groupe dont le siège se trouve à Lausanne conteste l’interdiction de la vente des puffs décrétée l’an dernier par le Grand Conseil valaisan. Depuis le 1er mai, ces cigarettes électroniques jetables ne peuvent donc plus être achetées sur le territoire cantonal, mais continuent de l’être ailleurs puisque, sur le plan fédéral, cette mesure est encore en discussion. Le géant du tabac, dont le CEO a par ailleurs déclaré vouloir «mettre les cigarettes au musée», conteste précisément la légalité de ce zèle du Valais. Le Tribunal fédéral tranchera. En attendant, ce n’est pas l’aspect légal qui me dérange le plus dans ce dossier. Les arguments de santé publique sont connus: fumer tue. De plus, ces puffs à usage unique nuisent à l’environnement. Mais leur interdiction est-elle la meilleure réponse? J’en doute pour au moins deux raisons. La première tient à un des motifs invoqués pour justifier l’interdiction. Trop d’adolescents consommeraient des puffs. Pourtant, ce produit n’est autorisé à la vente qu’aux majeurs. N’est-ce donc pas, d’abord, à chaque famille d’agir? L’Etat ne peut s’inviter dans notre vie privée sous peine de déresponsabiliser les citoyens. Deuxièmement, plutôt qu’interdire les puffs en raison de leur impact environnemental, il serait possible d’inciter les consommateurs à ne pas les jeter. Pourquoi ne pas leur proposer une récompense financière s’ils retournent leur appareil au revendeur lors de leur prochain achat? Et en parallèle développer une filière de collecte et de recyclage ? N'oublions pas non plus que ces cigarettes électroniques ne présentent pas que des inconvénients. Faciles d’utilisation et peu coûteuses, elles permettent aux consommateurs de tabac d’essayer une alternative moins nocive avant de passer, idéalement, à la version rechargeable, plus écologique. Le tout sans intervention publique lourde, l’Etat conservant de toute façon le contrôle sur cette activité – et évitant l’émergence d’un marché noir. Pour que cette approche fonctionne, il faut faire confiance aux individus et de les rendre responsables. Hélas, ce n’est pas tendance comme on le voit dans d’autres dossiers, à l’image de celui de la 13e rente AVS: votée par le peuple, mais sans financement. «Le discours actuel incite la société à tout attendre de l’Etat.» Beat Kappeler posait ce diagnostic déjà l’an dernier. Cette semaine, interviewé par Jonas Follonier à l’occasion de la parution de la version en français de son dernier essai, l’ancien syndicaliste devenu économiste libéral commente les accords bilatéraux III avec l’Union européenne (UE) signés par Berne et Bruxelles. Le peuple aura le dernier mot sur ce dossier stratégique pour la Suisse. Beat Kappeler a déjà forgé son opinion. Pour lui, c’est non. L’Argovien critique la «perte de souveraineté» que ces textes impliquent, et il voit l’UE mettre à mal la prospérité de la Suisse. Rejeter ces accords ne sera pourtant pas sans conséquence. Pour l’accès au marché et à la main-d’œuvre européenne ou pour la coopération universitaire et l’approvisionnement en électricité. Beat Kappeler minimise: il évoque «quelques sanctions à court terme». Cela me semble un peu court. Un examen approfondi des accords reste à faire. A ce sujet, Swissmem a livré ses conclusions vendredi. L’industrie suisse des machines les soutient. Terminons par deux scandales. Les F-35 coûteront 20% de plus que les 6 milliards de francs votés par le peuple! L’armée manque bien de transparence, comme l’analysait notre correspondant à Berne. Alors, quelle solution ? Tout simplement respecter la voix du souverain et acheter moins d’avions de chasse afin de s’en tenir à l’enveloppe budgétaire. Deuxième scandale: les Etats-Unis n’appliqueront finalement pas l’impôt minimal sur les multinationales de l’OCDE, eux qui en avaient pourtant été les initiateurs… Dans ces conditions, la Suisse aurait intérêt à dénoncer à son tour cet accord afin de maintenir sa compétitivité face à la première économie du monde. |